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Charlotte Ibal

L’influenceur « Responsable »

Dernière mise à jour : 3 août 2022



L’honnêteté, la transparence, «tout vous dire», sont peut-être les valeurs du marketing d’influence qui reviennent le plus souvent chez les influenceurs ces dernières années. Il est vrai que le public a parfois du mal à s’y retrouver : si une marque est clairement visible dans un contenu, est-ce une publicité, la simple envie de l’influenceur d’évoquer cette marque ou un partenariat caché ? La réponse n’est parfois pas aisée.

Depuis fin 2021, l’Autorité de la régulation professionnelle de la Publicité (ARPP) propose un certificat de l’Influence Responsable à destination des influenceurs afin de leur permettre de maîtriser au mieux le cadre légal et éthique du markéting d’influence.

Ce nouvel outil s’inscrit dans un contexte plus global de questionnement sur la transparence de la communication des influenceurs. Contrairement à d’autres pays, tels les États-Unis ou le Royaume-Uni, le marketing d’influence ne fait pas l’objet d’une réglementation spécifique en droit français. Cependant, l’ensemble des règles juridiques réglementant la publicité et la protection des consommateurs a vocation à s’appliquer à cette forme de communication.

C’est ainsi que les dispositions relatives aux pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L 121-2 à L 121-4 du Code de la consommation s’appliquent aux communications des influenceurs. Une pratique commerciale trompeuse n’est susceptible d’être sanctionnée que si, d’une part, elle est trompeuse au sens des articles L 121-2 et L 121-3 du Code de la consommation relatifs respectivement aux pratiques trompeuses par action et par omission et, d’autre part, elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé à l’égard du bien ou service.

A ce titre, plusieurs enquêtes diligentées par la Direction Générale de Concurrence et des fraudes (DGCCRF) relativement aux pratiques commerciales trompeuses ont poussé l’ARPP à s’interroger sur le métier d’influenceur et notamment les bonnes pratiques à adopter. En effet, des 2016, la DGCCRF s’intéressait aux partenariats noués entre les marques et les Youtubeurs afin de contrôler les pratiques commerciales trompeuses[1]. Très récemment, la star de téléréalité Nabilla Vergara avait accepté une transaction de la DGCCRF et payé une amende de 20 000 euros pour avoir fait la promotion de services boursiers sans mentionner qu’elle était rémunérée pour le faire. La DGCCRF avait jugé sa communication « trompeuse » à double titre : 1) la publication n’était pas signalée comme étant une publicité et 2) ces propos étaient de « nature à induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques du service et les résultats attendus »[2].

L’ARPP s’était déjà emparée de la question en publiant le 3 avril 2017 la quatrième version de sa Recommandation « Communication Publicitaire Digitale »[3] qui est une grille d‘interprétation rappelant aux influenceurs, annonceurs, agences et médias, l’obligation faite d’un point de vue déontologique d’identifier les communications commerciales.

L’organisation professionnelle distingue plusieurs situations selon trois types de contenus produits par les influenceurs : éditorial, commercial ou publicitaire.

Dans le cadre de son contenu éditorial, l’influenceur est libre de communiquer et relayer les informations de son choix sur une marque. Cela sera différent dans le cadre d’un partenariat, où la collaboration sera soit commerciale soit publicitaire selon les cas.

Pour l’ARPP, la collaboration est commerciale lorsque l’influenceur a l’obligation de publier un contenu en contrepartie d’une rémunération ou d’une contrepartie telle que la remise de produits ou services.

La collaboration aura un caractère publicitaire si les critères suivants sont réunis de manière cumulative :

  • Paiement ou contrepartie

  • Contrôle éditorial prépondérant de l’annonceur et validation du contenu avant sa publication

  • Le contenu de la prise de parole de l’influenceur vise à la promotion du produit ou du service

L’existence d’une collaboration commerciale ou publicitaire doit être portée par l’influenceur à la connaissance de son public. Cette information doit être explicite, de manière à ce que ce caractère promotionnel apparaisse instantanément, et pourra se faire « par tout moyen (dans le discours, dans le texte accompagnant le contenu, au moyen d’une mention dans la vidéo…) dès lors qu’elle est portée à la connaissance du public quel que soit son moyen d’accès au contenu ».

Les contenus promotionnels des influenceurs pouvant être qualifiés de publicité, les marques doivent s’efforcer de respecter l’ensemble des dispositions applicables en la matière et de suivre les recommandations de l’ARPP. Ces dernières, bien que dépourvues de valeur normative, sont susceptibles de servir de base à une régulation future du statut des influenceurs ou à une appréciation par les tribunaux de la loyauté de la communication.

L’influenceur doit quant à lui faire apparaitre clairement tout caractère promotionnel / publicitaire de ces publications. Il est ainsi fortement recommandé de prévoir précisément dans le contrat de partenariat les modalités et formes de cette identification qui peut se faire en utilisant la marque ou tout autre signe distinctif attaché à l’annonceur, par lequel le consommateur est capable de l’identifier.


Certificat de l’Influence Responsable.

Constatant que plus d’un contenu sur quatre n’était pas transparent sur la collaboration commerciale, l’ARPP a décidé de créer ce certificat à destination des créateurs de contenus « afin de promouvoir un marketing d’influence éthique et responsable, respectueux des publics. »

Pour 49 euros, l’influenceur se verra sensibiliser aux principales règles éthiques et juridiques de son métier. A l’issue de cette formation, il pourra s’entrainer puis passer le certificat.

Dans cette lignée, le CLUB MED a annoncé l’obligation pour les influenceurs collaborant avec le groupe d’être titulaire de cette certification[4], une décision très encourageante pour le secteur, montrant la volonté des marques d’être dans la transparence.

Reste à savoir si ce certificat trouvera son public et s’inscrira comme un gage de transparence dans un secteur qui cherche à s’autoréguler.


Auteur : Charlotte IBAL / Avocat / DE BUSSCHERE -AVOCATS -MHB -ASSOCIE


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